mardi 12 mai 2009

Ma vie est belle.

Trois heures, c'est beaucoup. C'est le temps qui m'était imparti pour une intervention à l'IUFM de Laon, auprès de 25 professeurs des écoles qui participent dans les quinze prochains jours à un stage sur "Les comportements responsables et solidaires à l'école primaire". Trois heures où l'on m'avait demandé de plancher sur la question "Qu'est-ce qu'être responsable?" C'est le genre de sujet très généraliste qu'on pose à un prof de philo et qui ouvre utilement un stage. Trois heures qui me semblaient un peu longues pour traiter de ce thème.

Il s'est passé ce qui se passe toujours : le temps m'a finalement manqué (mais je m'étais réservé une demi-heure pour présenter les activités de la Fédération des Oeuvres Laïques de l'Aisne). C'est drôle tout de même cette crainte d'avoir trop alors qu'on n'a pas assez ! Pourtant, c'est la troisième année que je fais cette conférence, je devrais être habitué. Mais j'oublie et l'inquiétude est la plus forte. D'autant qu'en relisant hier soir le fil conducteur de mon intervention, retrouvée après trente minutes de recherche dans mes archives (eh oui, au bout d'un an, les papiers s'accumulent !), je n'étais guère satisfait, ça ne me paraissait pas très enthousiasmant.

Il paraît que l'appétit vient en mangeant. L'appétit d'enseigner vient en enseignant. Mes notes un peu défraîchies ont pris des couleurs devant mes collègues, quand je suis entré dans mon exposé, que je l'ai fait revivre. Un cours, c'est un souffle, un enthousiasme, je dirais même une communion. Je crois que l'élan est passé à travers la salle. Mon public n'était pas des plus faciles : un enseignant devant d'autres enseignants, ce n'est jamais évident. Mais j'ai fait bouger, réagir. Enseigner, devant des jeunes ou des adultes, c'est créer un mouvement. L'inertie, l'indifférence, l'acquiescement poli, c'est l'échec.

Ma grande satisfaction, c'est que je suis reparti avec un projet : une chorale d'enfants qui illustrera un prochain ciné philo. Et puis, j'espère bien que je serai sollicité pour organiser un goûter philo dans des écoles. J'ai enfin laissé l'adresse de ce blog, car du primaire au lycée, sous des formes certes différentes, ce sont les mêmes problèmes pédagogiques qui se posent. Si Prof Story pouvait être le prolongement de mon intervention de cet après-midi, un lieu d'échange d'expériences, de réflexions et de témoignages sur l'école, j'en serais très heureux.

Comme j'étais heureux sur la route du retour, pourtant dans le mauvais temps, pluie, ciel gris mais paysage rendu très vert par l'humidité, un peu brumeux : aujourd'hui à Laon dissertant sur la responsabilité, demain à Cambrai exposant le marxisme à l'Université du Temps Libre, après-demain à l'IUTA de Laon pour parler du Zarathoustra de Nietzsche, samedi animant le café philo de Guise sur le thème de la crise, et dimanche, fin de semaine en beauté puisque j'aurais l'honneur d'animer le café philo des Phares à Paris, suivi comme la dernière fois d'une visite guidée par mes soins du cimetière du Père Lachaise. Le tout entrelardé de cours à mes élèves : ceux-là, il ne faut quand même pas que je les oublie ! Ils n'ont rien à craindre, même s'ils aimeraient peut-être bien ... Je ne sais pas si une vie d'enseignant est toujours belle. Pas nécessairement. Mais ma vie est belle.

6 commentaires:

Arthur Nouaillat a dit…

Un enseignant qui prend du plaisir à enseigner et à transmettre avec plaisir et passion son savoir à une belle vie en quelque sorte car il aime profondement son métier. Il aime ce qu'il fait. Je rêve de devenir professeur alors j'admire tous ses profs qui prennent le temps de bien expliquer, qui donnent des "beaux polycopiés" tapper avec grand soins à l'ordinateur ou encore ces professeurs qui discutent et qui comprennent les élèves en difficultés pour leur trouver des solutions, on le voit à leur façon d'enseigner, l'élève est un très grand observateur
Ces profs la ont automatiquement une belle vie

Emmanuel Mousset a dit…

C'est bien de rêver. Mais il faut aussi ne pas trop rêver.

L'élève est le meilleur juge et même le seul juge du professeur.

Arthur Nouaillat a dit…

Vous dites ça parce que j'ai dit que je rêve d'être professeur ?

Emmanuel Mousset a dit…

Oui, mais ce n'est pas pour vous décourager.

Anonyme a dit…

Oui, votre élan est passé, du moins je le pense! La teinte humoristique de votre exposé a très rapidement réussi à me débarrasser de l'a priori négatif que je portais sur cette intervention programmée d'un "prof de philo"... Le poids du passé est bien présent, désolée...
Aujourd'hui, nous avons pensé à vous quand un paquet de cigarettes a volé dans la salle en suivant une trajectoire plutôt inoffensive, puisque parabolique... mais je vous rassure, l'intervenant du moment n'était pas en train d'exposer, les responsables (ou les coupables?...) n'ont donc pas été réprimandés!
Je ne connaissais pas l'existence des goûters philo, mais j'avoue que ce type d'intervention me tenterait bien...
Enfin, en ce qui concerne votre souhait d'échange, cette démarche m'attire aussi, mais j'ai du mal à cerner le type d'anecdotes à sélectionner : uniquement celles qui se passent en classe, ou tous les évènements qui nous font réagir?

Emmanuel Mousset a dit…

C'est normal d'avoir un a priori négatif sur la philo ; certains profs ne font pas toujours ce qu'il faut pour rendre attractive la matière.

Dans toute classe, les objets volants, non indentifiés ou pas, devraient être strictement interdits !

Pour les goûters philo, il suffit de me proposer un ou plusieurs thèmes, et je proposerai une intervention. Me contacter sur ma messagerie perso : emmanuel.mousset@wanadoo.fr

Pour les échanges, sur ce blog dédié à l'école, ce sont des questions scolaires (au sens large) qui sont abordées.

A bientôt.