samedi 9 mai 2009

La philo partout !

Dans le numéro d'avril de Philosophie Magazine, je suis tombé sur un article qui m'a donné des idées. Son titre : "Un week-end à l'Ecole de la vie." Son chapô : "A Londres, le philosophe Alain de Botton s'est inspiré des écoles de sagesse antiques pour fonder une institution dispensant des cours autour des grandes questions existentielles ..."

Mais ce qui a surtout retenu mon attention, c'est que l'Ecole de la vie ne se contente pas d'un enseignement classique ; elle organise des voyages pour philosopher, mais de bien étranges voyages: "excursions dans des lieux étonnants - comme des aires d'autoroutes ou des jardins urbains - ou avec des buts insolites - par exemple observer les nuages." La philosophie nous a habitués à des bizarreries, mais là franchement, ...

Alain de Botton nous explique son intention: " Le monde qui nous entoure se caractérise par sa laideur. Comment ne pas être pris de cafard à la vue des aéroports, des centres commerciaux ou des lotissements ? Mais plutôt que de céder à une critique plaintive de la modernité, rappelons-nous que les catégories du "beau" et du "laid" ont toujours été fluctuantes." A partir de ce constat, notre philosophe propose un exercice pratique :

"Aujourd'hui, il est de bon ton de faire des descriptions apocalyptiques de Heathrow. Les usagers ne sont jamais à court de témoignages indignés sur la perte de leurs bagages dans ce triangle des Bermudes. Celui qui avouerait prendre plus de plaisir à traîner dans un aéroport qu'à atteindre sa destination passerait pour un cinglé. Et pourtant, dans les moments de déprime, j'ai souvent trouvé une forme d'apaisement à Heathrow, en errant dans les terminaux ou en m'asseyant devant une baie vitrée pour contempler l'incessant ballet des avions ..."

Je ne souhaite pas reproduire ce que fait Alain de Botton, mais m'en inspirer oui. L'idée que je retiens, c'est de faire de la philo in situ, in vivo. Hors de la classe ou de l'amphi bien sûr, mais aussi hors des cafés où j'organise mes débats. Hors les murs, quoi ! L'enfermement nuit peut-être à la philosophie, la soumission à un horaire aussi. J'imagine des animations philosophiques sauvages, impromptues, éphémères dans des endroits inattendus. Heathrow, c'est trop loin, trop compliqué, trop cher, mais dans ma ville de Saint-Quentin, les possibilités sont nombreuses. Devenir en quelque sorte le Christo de la philo : non pas emballer des espaces mais "emballer" des gens, des inconnus, des anonymes, leur faire déballer des idées au coeur de certains espaces.

Par exemple proposer un débat philosophique sur le voyage dans la gare, sur la nature dans un jardin public, sur la vie et la mort dans le hall de l'hôpital, sur le travail au Pôle emploi, sur le divertissement au coeur de la fête foraine, sur l'art dans le musée, sur l'image à l'entrée du cinéma, sur les échanges dans le parking d'Auchan ou Cora, etc. Les idées ne manquent pas, les lieux non plus : la plage, les rues piétonnes, la place de l'Hôtel de Ville, les terrasses de café, le marché, ... De la philo partout, et surtout là où l'on attend, où l'on ne sait quoi faire, où l'on perd son temps, où l'on s'ennuie, à la Poste, à la Sécu, là où il faut passer le temps : pourquoi pas en pensant ? C'est une occupation comme une autre, meilleure qu'une autre.

Pour mener à bien ce projet, il faudra prendre quelques précautions techniques : demander l'autorisation d'intervenir dans l'espace public, prévoir quelques chaises de jardin vite installées vite repliées, se munir de l'indispensable sonorisation mais légère, interpeller les passants en leur distribuant une feuille qui introduit au débat. L'été pourrait se prêter à cette activité. Pourquoi ne pas essayer ?

2 commentaires:

Anonyme a dit…

yes, Mr Mousset, you can! it's a very good idea !

Emmanuel Mousset a dit…

"Yes we kant !" comme je l'ai lu dans "Philosophie Magazine".