dimanche 19 avril 2009

Cogito ergo sum.

Avant ces vacances, avec mes classes, nous avons étudié le "Je pense, donc je suis", de René Descartes, Cogito ergo sum, quand on veut faire son savant et un peu son malin. Il y a comme ça des formules qu'on retient parce qu'elles claquent, "L'enfer c'est les autres" de Sartre, "La religion c'est l'opium du peuple" de Marx. Mais la plus connue, c'est celle de Descartes, qu'on a aussi honorée en la pastichant.

Les élèves la connaissaient, mais pas toujours son auteur. Certains m'ont cité Shakespeare, confondant évidemment avec "Etre ou ne pas être, telle est la question". Quoique le lapsus pourrait être le point de départ d'une réflexion, d'une confrontation entre le cogito ergo sum et le to be or not to be, les deux se préoccupant de l'être et de l'existence, grandes catégories philosophiques.

Pour le moment, soyons plus modestes, essayons de comprendre la fameuse formule. Car "Je pense, donc je suis", pris dans sa brutalité, ça ne veut rien dire. Quand je ne pense pas, je n'en existe pas moins! Donc, je ne voulais pas finir l'année en laissant mes élèves dans l'ignorance de la plus célèbre citation de toute l'histoire de la philosophie. Elle est à notre discipline ce que la Joconde est à la peinture, connue de tous et énigmatique.

D'où vient le "Je pense, donc je suis"? Du Discours de la Méthode, 4ème partie, un ouvrage que le philosophe rédige en français, ce qui est complètement révolutionnaire pour son temps, les intellectuels s'exprimant en latin. Mais Descartes reprend l'idée et la développe plus savamment dans un autre ouvrage, les Méditations métaphysiques, où la formule se transforme en "Je suis, j'existe", Ego sum, ego existo.

Par conséquent, j'ai photocopié et distribué aux élèves, sur une même feuille, les deux extraits, que nous avons étudiés à la suite, l'un éclairant l'autre et redoublant la compréhension de l'idée. Je vous épargne mes explications, le "Je pense, donc je suis" ne se lit pas, il se vit, ou plutôt je suis en charge de le rendre vivant. Et c'est un grand bonheur pour moi que de m'approprier d'aussi grands textes, l'un de 1637, l'autre de 1641, de leur donner un sens, une valeur, une importance, en 2009, devant des jeunes pour beaucoup d'origines modestes, au lycée Henri-Martin.

Je ne sais pas si Descartes serait fier de moi, mais je le crois, lui qui a rédigé précisément son Discours de la Méthode pour le mettre à la portée du public cultivé et pas seulement du public savant. Je me dis aussi que je fais décidément un bien beau métier, redonner vie et énergie à des trésors de la pensée humaine, restituer, par delà la poussière des siècles, tout leur éclat. "J'enseigne, donc je suis"!

3 commentaires:

Anonyme a dit…

J'ai une question à vous posez, vous qui pourriez peut être m'aider.

Comment peut-on se persuadez de ne pas faire quelque chose ?

Merci !

Emmanuel Mousset a dit…

Je ne suis pas sûr de très bien comprendre la question. Quand on ne fait pas quelque chose, on n'a pas besoin de s'en persuader, me semble-t-il. C'est plutôt quand on fait quelque chose que la persuasion est parfois nécessaire.

grandourscharmant a dit…

Moi, c'est en essuyant que j'ai pensé.
J'essuie donc je pense.