mercredi 7 janvier 2009

Le bonheur sous la neige.

"Elle est pas là, elle est pas là!", c'est sous ces cris que je suis entré dans le couloir qui mène à ma classe. Vous n'y pourrez jamais rien: c'est une joie irrépressible et universelle, qui vient du fond du coeur quand les élèves découvrent qu'un prof est absent. D'autant qu'il y avait, sur ma ville et dans sa région, le froid, la neige, le verglas, occasionnant de nombreux retards. La totale, comme disent les lycéens, qui espèrent que le pire (les conditions climatiques) engendre le meilleur (la suspension des cours).

Vous avez remarqué combien, cette année, les individus supportent très mal le froid? Pourtant, la saison est normale, rien d'exceptionnel, nous sommes simplement en hiver. Chez mes L, douze absents sur 32, chez mes ES, dix absents sur 34. Tout ça parce qu'il fait froid en hiver! Plus tard, nous nous plaindrons qu'il fait chaud en été...

Quoi qu'il en soit, en remontant ma rue pour rejoindre mon lycée et en traversant la cour de récréation enneigée, j'ai pris soin de marcher là où la semelle de mes chaussures me fixait au sol. Le risque de glissade était réel, et le déshonneur, l'humiliation et le ridicule au bout de la chute. Un professeur de philosophie à quatre pages dans la neige, vous imaginez un peu! L'attentat à la boule de neige n'était pas non plus à exclure, de la part de collégiens très friands de ce genre d'exercice. Je n'ai heureusement subi ni l'une ni l'autre.

Dans l'après-midi, je suis allé à Cambrai, à la demande d'une association type IUTA, qui propose des conférences dans l'enceinte du lycée Fénelon. C'est ce que j'appelle le grand public cultivé, plutôt âgé, un bon public, que j'aime beaucoup, avec qui j'ai un excellent feeling. C'était ma première intervention, sur le bonheur, où j'ai refait mon sketch philosophique préféré: à la question "Faut-il vouloir être heureux?" je réponds, à la surprise générale, que non, et j'étaie ma démonstration en 15 arguments.

C'est du cousu main, une provocation tout sauf gratuite, et une conclusion où je soutiens que le bonheur est le pire malheur qui puisse nous arriver. Le public se prend au jeu, m'interrompt à mon plus grand plaisir, on rit, on réfléchit, c'est merveilleux. Une bonne journée. Je n'irai pas jusqu'à dire une journée heureuse, ça me contrarierait.

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