mercredi 21 janvier 2009

Hors des murs.

Malgré toute l'admiration que j'ai pour le film de Laurent Cantet et le livre de François Bégaudeau "Entre les murs", je pense que l'enseignement se passe aussi, se prolonge en dehors des murs de l'école. J'en ai trois exemples, en ce qui me concerne, cette semaine:

Lundi, au Ciné-Philo, j'ai diffusé le film de Wang Xiaoshuai, "Une famille chinoise", une histoire de couple qui veut un enfant pour sauver un autre enfant mais qui ne peut pas. Je passe sur les détails, sachez seulement qu'il est question de vie et de mort sur fond de Chine contemporaine. J'avais invité Nicolas, prof de chinois dans mon établissement, qui nous a parlé de ce pays qu'il connaît bien et que nous connaissons mal. Un bel exemple d'éducation populaire! Et 51 personnes pour un film qui n'est pas grand-public, ce n'est pas mal. Dont une dizaine d'internes de mon lycée, ce qui est encore mieux!

Mardi, dans la petite ville de Guise, l'activité était tout autre, puisqu'il s'agissait de la remise des lots aux gagnants de la souscription volontaire de la Ligue de l'enseignement de l'Aisne, que je préside. Du monde dans la salle des fêtes, et Monsieur le Maire, comme il se doit. Ce n'est pas une banale distribution de récompenses, malgré la Twingo qui couronne le tout. C'est l'occasion, pour les uns et les autres, de rappeler l'importance de l'Ecole Publique et des valeurs laïques, de ses difficultés aussi. Les familles ne sont pas là pour ça, elles attendent leurs cadeaux, mais en attendant, elles écoutent, et quelque chose d'essentiel passe. Si chacun procédait ainsi, la société n'en serait-elle meilleure?

Mercredi, aujourd'hui, j'ai animé un Café-Philo à la Maison du Sophora, un établissement pour traumatisés crâniens. Le sujet: la liberté. Dans ce milieu, ce n'est pas d'emblée évident de philosopher. Le dommage mental laisse penser que rien n'en ressortira. C'est faux, tout s'est très bien passé, et nous n'étions pas si loin d'un Café-Philo ordinaire. Ce ne sont certes pas des malades mentaux, mais l'atteinte cérébrale est là. Cependant, le débat s'est normalement instauré, les arguments ont été échangés, la rationalité en quelque sorte circulait, les mots et les phrases avaient du sens. Il est beau de voir cette puissance universelle de la raison, de la philosophie, que rien ne peut finalement affecté. Enfants, pauvres, traumatisés crâniens, tous ceux que la philosophie a traditionnellement exclu de ses pratiques, tous ceux -là peuvent pourtant s'en nourrir, en tirer profit.

Du coup, j'ai pensé à cette phrase de Zarathoustra de Nietzsche, dans ce Prologue que j'étudie en ce moment avec mes L, partie I: "J'aimerais prodiguer et distribuer, jusqu'à ce que les sages parmi les hommes, à nouveau, se réjouissent de leur folie et que les pauvres soient heureux de leur richesse". Mais il faut sortir des murs pour comprendre ça.

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