samedi 27 décembre 2008

C'est grave docteur?

En couverture du numéro 25 de Philosophie Magazine (décembre 2008- janvier 2009), une drôle de photo: une infirmière faisant plutôt songer à une religieuse ou à une grande prêtresse égyptienne, avec le phi grec au devant de son voile, et ce titre: La philosophie, une médecine de l'âme? Bonne question, comme dirait l'autre. Un philosophe est-il un toubib de l'esprit, un prof de philo est-il un infirmier de l'existence?

Je réponds sans hésiter: non. Je crois même que la philosophie est tout le contraire. Loin de soigner les plaies, elle les fait saigner. On ne philosophe pas en apposant de la ouate mais du sel. On ne pense bien que dans la douleur (sans tomber dans le sado-maso!). Déjà, se poser des questions, qui est le commencement de toute philosophie, c'est déranger des préjugés, bousculer des habitudes mentales, briser des croyances communes.

Puis tenter de trouver des réponses n'est pas de tout repos. Confronter des idées, argumenter des théories, réfuter les thèses adverses, c'est plus l'image d'un champ de bataille que d'un lit d'hôpital. Résistant, guerrier, conquérant (de l'esprit bien entendu), voilà la métaphore qui convient au philosophe, pas la médicale. Philosopher, c'est prendre des risques, pas vouloir des pansements ou des médicaments.

Je comprends bien sûr l'intention (louable) de Philosophie Magazine qui consiste, sur les traces du philosophe contemporain Pierre Hadot, de faire de la philo une éthique plus qu'une idéologie, une manière d'être plus qu'une façon de comprendre, une pratique plus qu'une théorie. Et c'est en effet ce qu'on trouve par exemple chez les stoïciens et les épicuriens. Mais chez eux, il est moins question de médecine que d'exercice, d'autant que le philosophe vise à l'autonomie et n'a pas besoin d'une infirmière à son chevet. A tout prendre, la philosophie est une gymnastique, mais pas une médecine.

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