vendredi 28 novembre 2008

Panique dans les têtes.

Où en suis-je dans mes corrections de copies? C'est la question que se pose régulièrement un enseignant, surtout quand les conseils de classe du premier trimestre approchent, dans dix jours en ce qui me concerne. Il faut alors boucler les moyennes, vérifier si chaque élève a bien ses trois notes (un devoir par mois). Vous connaissez ma mésaventure d'hier, où deux élèves m'ont joué un sale tour.

Il me reste des travaux à corriger, ceux des TES2 et des TL2, pour tout vous dire. Vous savez donc à quoi mon week-end va être essentiellement occupé. Car la semaine prochaine, je dois remplir les bulletins, et ce n'est pas une mince affaire. En attendant, j'ai distribué aujourd'hui à mes trois classes le prochain sujet (l'un est à peine corrigé, il faut lancer le suivant!), à rendre pour avant les vacances de Noël.

C'est ma stratégie, dont je vous ai déjà parlé à la Toussaint: profiter des vacances non pas pour partir en vacances, mais pour corriger des copies. Attention, je n'en tire ni gloire, ni fierté: je ne fais que mon métier, on me paie pour ça. Quant aux élèves, je respecte toujours le délai de trois semaines, minimum syndical en quelque sorte pour préparer, rédiger et rendre un devoir.

En distribuant les feuilles des sujets, j'ai eu droit à une question de trois élèves, à propos de l'un des sujets de dissertation: le travail contribue-t-il à unir ou à diviser les hommes? Voilà ce qui m'a été demandé, et qui m'a mis en rogne: que faut-il répondre à la question? Unir ou diviser? C'était moins bien dit que ça, mais ça voulait dire ça. A quoi j'ai rétorqué: la réponse, ce n'est pas à moi de vous la donner, c'est à vous de la chercher!

En vérité, que s'est-il passé dans la tête de ces élèves, et dans la tête de combien qui sont restés silencieux? Habituellement, les questions de dissertation appellent des réponses affirmatives ou négatives. Mais peu importe, ai-je dit aux élèves en début d'année: en philo, on ne raisonne pas en oui/non, comme l'âne ferait hi han. Malgré mon avertissement, les esprits ont besoin, pour leur confort, de ces deux petits mots très tranchés, sans nuance, sans subtilité, oui/non.

Du coup, quand ils découvrent une question, à la façon de celle portant sur le travail, qui échappe à cette facile dichotomie, ils se sentent perdus. C'est malheureux mais c'est ainsi. Pourtant, à savoir si le travail nous unit ou nous divise, il n'y a pas de quoi être perturbé. Mais non, le systématisme est plus fort que tout. La réponse ne rentre pas dans les deux cases oui/non, c'est la panique dans certaines têtes.

De quoi vraiment me mettre en rogne. Comme s'il n'existait pas une gamme très riche de réponses: peut-être, à condition que, oui mais, non sauf, oui en un sens et non en un autre sens, etc. On ne répond brutalement oui ou non que lorsqu'on est dans un constat d'évidence, pas dans une recherche de vérité. Dire oui ou non, c'est passer aux aveux devant le policier ou se marier devant monsieur le maire ou monsieur le curé, ce n'est pas penser. Le "ni oui ni non", c'est le jeu préféré du philosophe.

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