mercredi 22 octobre 2008

Amour de l'école.

Ce matin, en commençant mon cours, à 8h00, j'ai pensé à François, le prof de lettres du film "Entre les murs". J'ai pensé à lui, mais pour penser à moi, la grande chance que j'ai d'enseigner en Terminale, au lycée Henri-Martin, à Saint-Quentin, la grande chance d'avoir des élèves à peu près calmes, qui ne se battent pas entre eux au beau milieu de la classe, qui ne m'interpellent pas en cours. Bien sûr, mon métier a ses difficultés, mais tout de même beaucoup moins grandes que celles auxquelles s'affronte François.

Ce film, sur lequel je veux revenir, est-il pessimiste, comme le croient certains? Certes, la violence règne, l'enseignement semble inutile, impossible. En apparence, la déprime et l'échec l'emportent. En apparence seulement. Car je vois de l'espoir, et même de la joie dans ce beau film. D'abord, les élèves parlent, mal, brutalement, parfois stupidement, mais ils parlent, ils échangent. Pour un prof de lettres, c'est l'essentiel, non? Le pire, et il m'est arrivé de le vivre, c'est le silence, l'absence, l'indifférence, la mort de la classe. Dans "Entre les murs", nous sommes du côté de la vie. C'est énorme, c'est formidable.

François abat un gigantesque travail pour capter et captiver sa classe. Et il n'y parvient pas si mal! Il se donne, moralement, physiquement. Et il obtient. Il sème et récolte. Quoi? Un sourire, une attention, un regard, et au bout du compte, du travail. Et ça prend, ça marche. Modestement bien sûr, mais réellement. Il réussit quelque chose de très beau: redonner de la fierté aux élèves. C'est ça, je crois, l'école républicaine. Car ses élèves sont des enfants d'exclus, de pauvres, d'immigrés. Allez vous étonner qu'ils n'adhèrent pas au système, comme le font sans se poser de questions les fils et les filles de bourgeois.

C'est pourquoi je ne comprends pas la critique de Nicole Aurigny, ancienne prof de lettres au lycée La Ramée, qui intitule son article dans le bulletin de Force Ouvrière: "Mépris de l'école, mépris des élèves". Je pense, je sens exactement le contraire en voyant ce film (je n'ai pas encore lu le livre): amour de l'école, amour des élèves. La fin aussi est belle: ce match de foot entre élèves et enseignants, pour terminer l'année, avec le principal comme goal... cravaté!

La communauté se ressoude dans le jeu, dans la joie. Ce n'est pas grand-chose là encore, mais c'est beaucoup. On attend trop de l'école de grandes choses, et l'on a raison. C'est faire honneur à l'institution. Mais on devrait apprendre à en apprécier les petites choses tellement précieuses, ses victoires ordinaires et banales qui font avancer les élèves, qui précisément les élèvent vers autre chose qu'eux-mêmes.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

il est vrai que le coté vivant de la classe est vraiment beau dans ce film. Je pense pouvoir vous expliquer pourquoi un certain silence se pose dans la votre, enfin celle des TL2. cela tiens en un mot,l'intimidation. je m'explique, l'année est lancer mais pas encore assez pour que nous nous lancions a fond dans nos réflexions, surtout devant vous ! apres ce n'est que mon avis...
PS: si vous avez vu le film Matrix, je pose une question que je trouve philosophiquement intéressante a son propos sur mon blog, et votre avis m'interesse...
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